Désignation Premier-ministre : le déséquilibre électoral pèse lourd dans les consultations

Intrigant qu’après les cent premiers jours de la prise de pouvoir par Félix Tshisekedi, le Premier-ministre ne soit pas toujours nommé. Outre les considérations géopolitiques qui ont étalé les causes exogènes du grand retard dans la nomination du Premier-ministre, des causes endogènes sont également mises en évidence par les anlystes et observateurs. A se fier à leurs analyses, la RDC paie les frais de l’échec électoral du Cap sur le changement (Cash), la coalition électorale qui a porté Fatshi à la victoire au scrutin présidentiel du 30 décembre 2018.

En effet, après la proclamation, le 10 janvier 2019, des résultats aussi bien des législatives nationales et provinciales, il s’est avéré que le Front commun pour le Congo(FCC), avait une majorité parlementaire très confortable de plus de 330 sièges à la  Chambre basse. En vertu de la Constitution, c’est du FCC que doit provenir le Premier-ministre. Le Cash, voire l’opposition en général, qui n’avait plus misé que sur la victoire à la présidentielle, s’est vite alors rendu compte de ses erreurs de stratégie électorale, car avec la cohabitation, le président issu du Cach ne va pas, en vertu de la Constitution, définir la politique du gouvernement.

Vite, dans le giron du Cash, l’idée de la dissolution du Parlement fait son bonhomme du chemin, mais butte, in fine, contre un obstacle majeur : la Constitution. Tout en octroyant la capacité au Président de la République de dissoudre le Parlement, elle soumet cette habilité à certaines conditions non réunies  pour le cas d’espèce.

C’est alors que naît la deuxième idée, basée sur le débauchage des députés des platesformes du FCC. Même si certains au sein du Cash ont combattu cette idée, l’on dira qu’elle n’a pas fait chemin étant donné l’impossibilité de débaucher individuellement des députés nationaux qui risquaient, en vertu de la loi, de perdre leurs sièges acquis  sous le label des plateformes auxquelles ils appartiennent. Outre qu’il est apparu difficile de débaucher des plateformes entières du FCC, il y a aussi les deux réunions décisives tenues entre Joseph Kabila et les siens, la première le 20 février à Kingakati et la seconde le 24 février au parc animalier de la Nselé, pour consolider les liens au sein du FCC qui ont rendu impossible le débauchage aussi bien des députés que des plateformes du FCC.

C’est même cette volonté du Cash de débaucher certains députés du FCC pour espérer réaliser la majorité des sièges à l’Assemblée nationale qui a conduit à toutes les chicaneries que la RDC a connues autour de l’interprétation du très clair article 78 de la Constitution qui aborde la procédure de la nomination du Premier-ministre. On a chipoté en exigeant la désignation au-préalable d’un informateur pour identifier une majorité dans l’Assemblée nationale alors qu’elle était déjà évidente, le temps de tenter quelqu’initiative pour se constituer une majorité. Face à la clarté de cet article et aux lices qu’il y a eues et vu la bénédiction de la création de la coalition FCC-Cach, les débats sur la  désignation au préalable d’un informateur ont pris fin, cédant la place à ceux du profil de qui doit être désigné Premier-ministre. Albert Yuma aurait été proposé à Fatshi qui aurait réfusé catégoriquement de le nommer. C’est alors que Joseph Kabila a du proposer un autre liste à Fatshi.

Aux récentes nouvelles, profitant des effets de la constitution de la coalition FCC-Cach, le Cach ne jure que par un Premier-ministre issu de lui au point que certains proposent même que Vital Kamerhe soit nommé Premier-ministre. Réçu par Fatshi, Aubin Minaku cadre éminent du FCC dira sur RFI qu’il n’y avait pas de débat à incruster là-dessus, dans la mesure où le Premier-ministre sera issu du FCC. De la coalition ou du FCC ? le FCC fait partie de cette coalition. Le FCC va-t-il subordonner sa majorité aussi bien dans la Chambre basse que dans la coalition à la volonté louche de Fatshi de nommer un Premier-ministre de son goût ? Le Cach se serait-il résigné devant la coalition pour finalement réaliser sa volonté de voir un de ses cadres occuper la primature ? Quelle sera la résultante des forces actives sur le processus de désignation du Premier-ministre ? Le bon sens, ce nous semble, exigerait que le Premier-ministre vienne du FCC vu la Constitution, tout autant qu’au regard de  cette même Constitution, malgré la coalition FCC-Cach, le Président de la République a usé et use de ses attributions, compétences et prérogatives constitutionnelles pour constituer son cabinet et nommer les mandataires de l’Etat sans que le FCC ne demande d’avoir part à ce gateau au nom des dividendes à tirer de la coalition.

Si Cach avait eu la majorité au Parlement, Fatshi aurait eu les mains libres pour nommer le Premier-ministre. Mais là, Cach n’a pas eu une telle majorité et il ne devrait pas réaliser un passage forcé pour en nommer un, marchant sur le droit du FCC qui a obtenu la majorité dont les effets constitutionnels ne sont pas abrogés par la coalition FCC-Cach. Mais si c’est de propos délibérés que le FCC permet que Fatshi nomme un Premier-ministre non issu du FCC, même si cela viole la Constitution, il n’y aura pas d’effet politique et juridique dans la société vu qu’il n’y aura pas de protestation de la part du FCC qui aura librement aliéné son droit. Mais si tel n’est pas le cas, aucun prétexte ne vaut pour marcher  sur le droit du FCC, car la même centrale électorale qui a proclamé Fatshi vainqueur est la même qui a proclamé la majorité parlementaire pour le FCC. Fatshi jouit de la présidencne du pays en vertu de son score électoral sans autre consédération, de même que le FCC devrait fournir le Premier-ministre  sans considérations  extraconstitutionnelles d’aucun ordre.

Samy BOSONGO

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